Samedi matin, il devait être près de onze heures du matin lorsque Thomas leva les yeux de ses livres en soupirant doucement. Une nouvelle dispute entre sa sœur et Noah venait d'éclater, se levant rapidement, l'étudiant en médecine alla trouver ses petites et adorables nièces pour les emmener jouer dans le jardin ou bien faire un petit tour après les avoir habillées chaudement. Il avait longuement hésité à intervenir dans la "discussion" entre le couple histoire d'aider sa sœur mais il savait que cela ne servirait à rien, mis à part peut-être à dégrader encore plus la situation. Le jeune homme avait alors privilégié le fait que les jumelles n'entendent pas leurs parents se disputer. S'éloignant donc un peu avec avec les petites, il leur fit faire un petit tour d'un petit quart d'heure en espérant que le plus gros de la dispute serait passé. Effectivement, en revenant plus de cris, ni de ton élevé. Comme si rien ne s'était passé. Laissant les jumelles à leur père, il se dépêcha ensuite de retrouver sa sœur. Il ne fallait pas être devin pour savoir qu'elle allait être mal. Très mal même. Il ne comprenait pas Noah, est-ce qu'il ne pouvait pas essayer de se mettre à la place de Nelye ?! Se retrouver en fauteuil, même si c'était pour une durée déterminée devait être quelque chose de très dur psychologiquement. Alors oui, bien sûr qu'elle pourrait essayer de faire un effort pour ses filles, mais elle n'était quand même pas à blâmer de la sorte.

Une fois près de sa frangine, il la serra doucement et tendrement dans ses bras avant de lui déposer un petit bisou sur le front. T'inquiètes pas ma Nel', ça va s'arranger j'en suis sûr. N'écoute pas tout ce qu'il raconte sous le coup de la colère, tu es une mère géniale, tu sais très bien t'en occuper, et je sais de quoi je parle. Il se tut quelques secondes avant de reprendre Ce n'est qu'une mauvaise passe, après tout ira mieux, d'accord ?! Il lui fit un petit sourire avant de lui faire un nouveau un tendre baiser sur la joue Je t'aime grande sœur ! Oui, il l'aimait, il l'adorait, elle était un peu tout pour lui, c'était grâce à elle qu'il en était-là aujourd'hui, parce qu'elle avait été présente après sa tentative de suicide, parce qu'elle avait tout fait pour qu'il aille mieux. Tout comme après la mort de leurs parents alors que lui allait sur ses neufs ans, elle en avait juste quatorze et pourtant c'était principalement elle qui l'avait élevé; plus que leurs frères aînés qui se fichaient complètement d'eux, qui n'avaient jamais réellement fait attention à s'ils allaient bien ou non. Oui, il lui devait tout, et maintenant c'était elle qui avait besoin de lui alors c'était bien normal qu'il l'aide du mieux qu'il le pouvait.

Après quelques instant de silence, il eut une idée et lui proposa Tu veux qu'on aille faire un petit tour ?! Ça te fera du bien de sortir prendre l'air, et puis, on peut aller manger une glace, ou une gaufre, avec plein de nutella et de chantilly dessus ! Tant pis pour ses révisions. Sa sœur était quand même beaucoup plus importante. Il ne savait pas quoi lui dire d'autres, peut-être lui "ouvrir les yeux" en disant qu'elle avait de la chance incroyable d'avoir un mari qui l'aime -malgré tout- et deux magnifiques filles. D'un côté il l'enviait, il aurait voulu que tout soit aussi simple pour lui, mais c'était loin d'être le cas, et ça ne le serait certainement jamais. Thomas savait pertinemment que c'était de sa faute, peut-être qu'en faisant des efforts, cela marcherait avec une fille, qu'elles n'étaient pas toute comme Abby, mais il n'était pas encore prêt à prendre le risque... Cela lui avait déjà bien trop coûté par le passé. Sortant de ses pensées, le jeune homme reporta toute son attention sur sa grande sœur.

Peinant à me lever de ma chaise, je ronchonna légèrement. Cela faisait trois mois que j'étais en chaise roulante et je n'avais fais aucun progrès pendant ce laps de temps, absolument aucun. Le médecin continuait de me répéter que j'étais dans la bonne direction alors que je savais bien que ce n'était pas le cas, absolument pas. J'étais fatiguée d'essayer de sortir mes fesses de cette chaise, de m'agripper aux bras parallèles prévues pour m'aider et de ne jamais réussir à me soulever. Je n'étais pas lourde, loin de là même mais rien n'y faisait. Noah commençait à en avoir marre et je pouvais le comprendre. À vrai dire, je le comprenais et à sa place, j'aurais sûrement piquer une crise bien plus tôt. Les jumelles avaient déjà deux ans et elles avaient besoin d'une mère en bon état, sûrement pas un déchet ambulant comme je l'étais. Je tentais de me battre pour mes filles mais c'était trop difficile. Attrapant la bouteille d'eau à côté de moi, je la lança de toutes mes forces contre le mur. Cette partie de mon corps fonctionnait très bien et cela me déprimait encore plus ! J'avais besoin de mes jambes bordel ! Soufflant fortement, je me dirigea vers la bouteille avant de la ramasser sous les yeux sans vie de Noah. Il venait sûrement de voir toute la scène et allait bientôt dire que j'étais inconsciente, qu'une des jumelle aurait très bien pu passer par là pile à ce moment. Le regardant – de ma chaise roulante – j'appuyais mon regard. Il était hors de question que je tourne les yeux ! La dispute ne mit guère longtemps à démarrer et – comme depuis quelques semaines déjà – le ton monta rapidement. Je détestais ces disputes, je détestais que les filles entendent nos hurlements même si je savais que Thomas allait les emmener loin quelques minutes. Mon frère était parfait pour cela – et pour bien d'autres choses – et je ne regrettais pas une seule seconde de l'avoir pris en parrain pour Fleur. Les mots fusaient, les reproches aussi. Je vidais mon sac mais cela ne me faisait pas le bien que j'aurais voulu. J'avais toujours mal. Mon cœur me tiraillait toujours et les larmes montaient de plus en plus. « De toute façon, t'es un déchet Nélye ! T'es une horrible mère et une horrible femme ! Tu fais plus rien, tu te laisses aller dans ton fauteuil. Tu joues la victime. Bats toi bordel ! T'as deux filles qui t'attendes et un mari ! T'es pas toute seule » C'était la goute d'eau qui fait déborder le vase. Le regardant droit dans les yeux, je lui fis signe de se pousser et avança dangereusement vers lui. S'il ne dégageait pas de mon chemin, je lui roulait sur les pieds et puis c'est tout ! Sortant de la maison – en léger pull – je regardais dans le vague. Il avait raison mais c'était tellement difficile, cela me faisait tellement de mal ! Je ne pouvais pas y croire, il n'avait pas pu me dire ça. Une larme coula le long de ma joue. Je l'essuya tout aussi rapidement lorsque j'entendis du bruit derrière moi. Si c'était Noah qui venait s'excuser, il pourrait rapidement aller se brosser. Reconnaissant la voix de mon petit frère, je tourna le visage vers lui et lui fis un très léger sourire. Cette situation, je n'en pouvais plus. Et le pire dans l'histoire, c'était que ces tordus de Wellinghton mettait l'accident sur moi alors que c'était leur sœur qui m'était rentrée dedans, complètement bourrée. Sentant ses lèvres sur ma joue, un léger sourire pris place sur mes lèvres. Heureusement qu'il était là pour me soutenir parce que ce n'était pas sur Max que je pouvais compter, ni sur Noah. « Je t'aime grande sœur ! » Lui tendant les bras pour qu'il se baisse pour pouvoir l'enlacer, je passa ma main dans son dos et répondis « Moi aussi petit frère. Heureusement que t'es là » Je me doutais que, de temps en temps, Thomas se sentait de trop dans la famille que nous composions, Noah, moi et les jumelles mais franchement, sans lui, je n'aurais jamais pu m'en sortir à la naissance de Violet et Fleur. Noah n'avait pas pu prendre de longs congès et moi, j'avais été forcée de retourner travailler le plus vite possible. Averlow avait besoin de moi, et pas qu'un peu ! Soufflant légèrement, je regrettais d'avoir été à cette fichue soirée en octobre dernier. Sans ça, j'aurais toujours mes deux jambes et toute ma famille serait heureuse. « Tu veux qu'on aille faire un petit tour ?! Ça te fera du bien de sortir prendre l'air, et puis, on peut aller manger une glace, ou une gaufre, avec plein de nutella et de chantilly dessus ! » Levant les yeux vers Thomas, je secoua légèrement la tête de haut en bas pour lui montrer que oui, je voulais bien faire un petit tour. Bien entendu, je n'étais pas contre la gaufre mais seulement si c'était moi qui payait ! Attrapant sa main, je dis « Emmène moi à la plage Thom. J'ai besoin de voir les vagues. J'espère juste que tu es motivé parce que je ne compte pas me trainer dans le sable des planches de bois jusqu'au bord de l'eau » Il allait devoir me soulever comme une mariée pour me déposer près de l'eau. Je rêvais tellement de sentir l'écume gelée de la mer sur mes petits pieds. Je ne sentirais pas grand chose, pour ne pas dire rien mais tout de même... Rentrant rapidement prendre une veste, je déposa un baiser sur le front des jumelles avant de quitter la maison accompagnée de Thomas. « Tu le penses vraiment quand tu dis que je suis une mère géniale ? J'ai l'impression d'être la pire des mères mais j'y arrive pas, j'arrive pas à sortir mon cul de cette chaise. J'ai l'impression de peser trois cent kilos.. » Je porta mes yeux sur le jeune homme avant qu'il passe derrière le fauteuil et me pousse en direction de la plage, à deux minutes à pieds de là où je vivais, où nous vivions...

Un câlin, quoi de mieux pour remonter le moral ? Il ne pouvait pas lui rendre ses jambes, il ne pouvait pas lui rendre sa vie d'avant alors la seule chose qu'il pouvait faire, c'était être-là, lui donner un soutient sans faille. Lui dire à quel point il tenait à elle, à quel point il l'aimait. Cela ne pouvait paraître rien, mais dans de telles situations des fois c'étaient de simples gestes qui pouvaient aider à faire tenir. Nelye lui dit qu'elle l'aimait elle aussi et qu'heureusement il était-là. Oui, sûrement, mais il était certain que le couple s'en sortirait à présent mieux sans lui, sans qu'il soit tout le temps dans leurs pattes, enfin tout le temps, quand il n'était pas en cours ou à l'hôpital. Enfin, dés que Nelye irait mieux il essayerait de se trouver un logement étudiant pour laisser la petite famille vivre en paix. Il connaissait déjà les arguments de sa grande sœur, elle lui dirait qu'il ne dérangeait pas et compagnie, mais il se sentait quand même parfois de trop et il détestait cette impression et ces quatre dernières années, il l'avait un peu trop ressenti à son goût. Alors oui, il était discret, ne faisait pas de bruit, ne ramenait personne sauf quelques fois une amie ou deux mais c'était très rare, et puis de toute manière, il n'avait pas tant d'amis que cela quant à une petite amie, c'était presque un doux euphémisme de croire qu'un jour il pourrait avoir une relation normale avec une demoiselle. Il savait aussi bien s'occuper des jumelles et adorait le faire, mais cela il serait toujours en mesure de le faire même en ayant un petit logement à lui. Par ailleurs, aussi égoïste que cela puisse paraître, des fois il regrettait amèrement que sa tentative de suicide avait échoué, il s'en était fallu de peu et même si à présent les histoires avec Abby n'étaient plus de mises, le traumatisme causé par ces dernières années était toujours présent, toujours dérangeant, l'empêchant de vivre une vie amplement épanouie. Alors oui, il allait bien, il adorait ses études, sa famille, mais il se sentait à part quand il voyait ses camarades de promotion enchaîner les coups d'un soir ou bien être en couple depuis plusieurs mois/années, c'étaient des choses qui dans son esprit étaient totalement impossible pour lui.

Thomas lui avait ensuite proposé d'aller faire un tour et de manger quelque chose de bien calorique histoire de se remonter le moral,et visiblement cette idée plaisait à son aînée ce qui fit sourire le garçon. Serrant doucement la main de sa sœur dans la sienne, il acquiesça avant de rire un peu C'est bon, je suis certain que tu es légère comme une plume, ça ne devrait pas trop poser de soucis ! Je suis pas trop un gringalet non plus ! Bon à côté de Noah, il faisait gringalet, mais au final il mesurait quand même 1m82 et même si au premier abord il faisait maigrichon, il était quand même un minimum musclé, alors oui, porter sa sœur ne poserait aucun problème. Le seul soucis auquel il pouvait se confronter serait à la limite le fait que marcher dans le sable pouvait être parfois difficile et qu'ils risquaient de tomber ! D'accord, je t'emmène à la plage, pour la gaufre on la mange avant ou après ? Même si ça ne me gênerait pas que ce soit avant ET après. Bonjour, je m'appelle Thomas et je suis un ventre sur pattes. Sur ces bonnes paroles, il lui fit un énorme sourire digne de colgate. Nelye avait l'habitude de ce genre de phrase et il savait donc que cela ne la choquerait pas plus que cela.

Quelques minutes plus tard, une fois que son aînée ait été prendre une veste pour se couvrir un peu plus et ait fait un petit bisou à ses filles, Thomas commença à pousser le fauteuil en direction de la plage qui était juste à côté, c'était quand même formidable d'avoir une plage à moins de cinq minutes de chez soi non ?! Il réfléchissait à la manière dont il pouvait répondre à sa sœur, en étant à la fois le plus positif, et impartial possible. Il ne comptait pas lui mentir, ça ne lui serait pas bénéfique, il fallait juste qu'il tente d'être diplomate le plus possible et de dissocier le fait qu'après la mort de leur parents se soit elle qui l'avait en grande partie élevé. Cette histoire n'avait rien à faire là et pourtant... pourtant elle avait été formidable et il en lui serait à jamais reconnaissant. Bien sûr que oui tu es une mère géniale. Peut-être que... que tu ne peux pas tout faire, que tu ne peux pas les élever comme tu le voudrais... Mais tu es là pour elles non ? Tu es là quand elles ont besoin de toi. Tu les aimes, et elles le savent. C'est le plus important non ?! Il se mordilla doucement la lèvre et chercha d'autres choses à dire qui seraient peut-être un peu plus persuasives Et puis, tu sais, plus tard elles ne se rappelleront pas, si des fois tu as un peu merdé. Tu ne les frappes pas, elles sont heureuses, épanouies, elles ont un père, une mère... Alors détends-toi un peu sur ça. Sois juste présente pour elles, donne leur tout l'amour dont tu disposes, je pense mais je peux me tromper, que c'est tout ce dont elles ont besoin actuellement. Il se tut de nouveau quelques instants avant de se passer une main dans les cheveux. Pour tes jambes, ne désespère pas, si le médecin trouve que tu faits des progrès c'est que ça doit être vrai même si toi tu ne le vois pas ! Je ne vois pas pourquoi il te mentirait ! Continue de faire tout ce qu'il te dit, et positive, crois-y car le mental joue très souvent là-dedans. Il s'arrêta-là car il ne savait pas quoi dire d'autres et de toute manière ils étaient arrivés à la plage. La prenant dans ses bras en faisant bien attention à ne pas lui faire mal, il l'emmena jusqu'au bord de l'eau où il la déposa sur le sable avant de s'asseoir à côté d'elle. Si on m'avait dit que tu serais la première fille que je porterai de la sorte... Il se coupa net dans sa phrase. Il avait dit cela d'une façon assez amer. Regardant l'horizon pendant quelques secondes les yeux perdus dans le vide, il reporta rapidement l'attention sur sa sœur tout en lui faisant un petit sourire Je devrais pas aller chercher ton fauteuil pour le laisser à côté de nous ?! Oui sait-on jamais s'il y avait un voleur dans le coin !

« D'accord, je t'emmène à la plage, pour la gaufre on la mange avant ou après ? Même si ça ne me gênerait pas que ce soit avant ET après. » Regardant Thomas, un léger rire s'échappa de mes lèvres. J'étais bien tentée pour manger une crèpe – ou une gaufre – avant et après mais ce serait du suicide. Je ne pouvais plus faire d'exercice depuis quelques mois et, à cette allure, j'allais ressembler à un sumo sur pattes. Toutes les calories que j'avalais descendaient directement sur mes hanches, chose que je ne supportais pas ! Vivement que cette fichue colonne vertébrale se remette en place et que je puisse enfin marcher. J'allais devoir abandonner les talons que j'aimais tant mais j'étais prête à le faire, tant que je pouvais mettre un pied devant l'autre. « On va en manger une après si ça ne te gène pas... J'ai besoin de profiter de la plage, du sable et de tout ce qui va avec. J'aimerai tellement sentir l'eau gelé sur mes pieds. Si je ne sens rien, on ira manger une gaufre pour me remonter le moral » Je lui fis un léger sourire. J'avais tellement envie et besoin de me sentir vivante. C'était tout ce que je voulais, me sentir vivante, pouvoir sentir les mêmes choses que tout le monde. Sentir l'écume des vagues serait tellement parfait, je ne pouvais pas le nier... J'avais besoin de cela plus que tout. J'étais un vrai déchet, j'avais honte de moi, de ma vie, de la tournure catastrophique que prenait mon histoire. Il était tout bonnement hors de question que je reprenne la voiture un jour ou l'autre. J'avais survécu à deux accidents et je doutais fortement survivre à un troisième carambolage. En temps normal, on dit jamais deux sans trois mais là, j'en doute terriblement. J'avais une chance de retrouver l'usage de mes jambes mais dans combien de temps, c'était autre chose. Alors que Thomas me poussait, je lui faisais part de mes peurs, de mes appréhensions vis à vis des filles. J'avais tellement peur qu'elles me voient comme une mauvaise mère, comme une incompétente. C'était peut être ce que j'étais en fait... Déglutinant difficilement, je l'écouta me parler, me répondre et me dire des choses que j'avais besoin d'entendre, que j'avais envie d'entendre. J'étais contente que quelqu'un voit mes efforts, voit le fait que malgré mon malaise face à tout cela, je tentais de m'en sortir alors que tout – ou presque – me donnait envie de lâcher prise. Les médecins pouvaient dire ce qu'ils voulaient, je n'étais pas foutue de mettre un pied devant l'autre et ça, c'était pire qu'horrible. Mes yeux se remplissaient de larmes au fur et à mesure que Thomas parlait. Sans lui, je n'y serais jamais arrivée, autant le dire. Mon petit frère était pour moi et je m'en voulais toujours horriblement de l'avoir laissé dans sa souffrance il y a quelques années de cela... Lui était là, il ne faillait pas à son poste pendant que Max et Steven étaient aux abonnés absents. « Merci Thom, merci d'être là » lui dis-je, avant de sentir le fauteuil s'arrêter et de ravaler mes larmichettes. Je ne voulais pas paraître faible devant lui, il ne méritait pas cela non. Il méritait une grande sœur heureuse, forte et battante ; pas une pleureuse. Lorsqu'il me prit dans ses bras, je m'agrippa à son cou et le laissa m'emmener au bord de l'eau. Je devais l'admettre, j'avais honte d'être réduite à cela mais je n'avais pas le choix. Ramper comme un serpent sur le sable n'était pas franchement glorieux non plus et là, j'avais encore une once de dignité. Posant mon postérieur sur le sable, je souris à la remarque du jeune homme. Je tourna le visage vers lui, léger sourire sur les lèvres « Bah quoi, t'aimes pas porter ta sœur ? » C'est sur que, pour une première fois, ce n'était pas glorieux. Je n'étais ni sa femme, ni sa petite amie et je n'avais pas une robe bouffante d'un blanc immaculé. C'était tout ce que je lui souhaitais, au petit dernier de la famille. Je lui souhaitais tout ce que j'avais il y a quatre mois encore ; une famille heureuse et aimante, une vie de rêve et surtout, un voile opaque sur tous les événements douloureux du passé. J'avais réussi à bloquer toute cette merde du passé pour être enfin heureuse. Seulement avec l'accident, tout était revenu à la surface. « Je devrais pas aller chercher ton fauteuil pour le laisser à côté de nous ?! » Souriant légèrement, j'acquiesçais avant de dire « Sauf si tu veux qu'on nous le pique. Tu devras me porter en marié jusqu'à la maison ! » Je lui fis un clin d'oeil avant de le laisser plier le fauteuil et le ramener près de nous. J'en profita pour me déplacer un peu plus près à l'aide de mes bras. Grrr, je détestais cette façon de me déplacer, j'avais l'impression d'être une larve ! Le voyant revenir, je me stoppa nette et regarda mes pieds. bougez, bougez Je ne cessais de répéter ces deux mots dans ma petite tête. Ils devaient bouger et vite ! « Bon et sinon petit frère, quoi de neuf dans ta vie ? Ça va la faculté ? Noa n'est pas trop chiant avec toi ? » Question banale mais c'était aussi une façon de voir comment mon mari se comportait au travail puisque je n'en savais rien... Nos discussions ne tournaient qu'autour de mon handicap alors sa vie de chirurgien était plus qu'un doux souvenir pour moi...

Oui bon, il est vrai qu'en proposant d'aller manger une gaufre avant et après la balade le jeune homme avait exagéré mais il avait faim en fait... et la gourmandise est certainement un vilain défaut mais c'était certainement son plus gros péché. Et puis, si au final le garçon faisait pas mal d'exercices ce n'était pas le cas de sa sœur et il avait tendance à l'oublier un peu rapidement. La demoiselle ne tarda d'ailleurs pas à répondre, et cela fit sourire légèrement son cadet qui répliqua aussitôt Non pas de soucis, je peux manger dans un petit moment,.... par contre je pense que je prendrais deux gaufres quand même, mais en même temps. J'ai le droit ?! Il lui fit le regard du chat poté avant de reprendre Pas de soucis, je t'emmène jusqu'à l'eau mais tu sais que l'eau est vraiment très froide, faut faire attention à ne pas tomber malade, après je vais devoir le docteur à la maison, alors oui, je sais que ce sont mes études mais que tu sois mon cobaye perso, ne me tente pas trop. Il lui fit un énorme sourire avant de lui coller un nouveau baiser sur la joue.
Le jeune homme poussait à présent son aînée vers la plage tout en tentant de la rassurer sur le fait qu'elle était une bonne mère. Il était sûrement un peu maladroit dans ses paroles mais il essayait de rester rationnel, de lui prouver qu'elle avait tord de s'en faire pour ses jumelles. Des tas et des tas d'arguments lui venaient en tête mais c'était assez confus, alors il préféra rester à l'essentiel. L'amour qu'elle pouvait leur porter, le fait qu'elle serait toujours là pour elles. Tout en lui rappelant qu'à deux ans et quelques, elles ne garderaient que très peu de souvenirs de cette époque et visiblement son petit discours avait fait mouche vu le regard plein de larmes qu'avait à présent la demoiselle. Lorsque Nelye reprit la parole, il se contenta de sourire avant de répliquer Mais de rien, c'est normal non ?! Il savait qu'elle voulait se montrer forte devant lui, c'est pour cela qu'il fit comme s'il n'avait pas remarquer ses petites larmes aux coins des yeux de son aînée. Vu qu'ils étaient arrivés à destination, le plus jeune souleva sa sœur pour l'emmener jusqu'au bord de l'eau avant de s'installer assis à côté d'elle, à présent légèrement morose. Si Nelye devait se sentir mal qu'il soit obligé de la porter de la sorte, lui, cela lui foutait quand même un petit coup qu'elle soit la première fille qu'il portait comme cela. C'était certainement stupide, mais ça faisait quand même quelque chose d'assez romantique, du moins dans les films, et lui en était toujours plus ou point au point zéro. Il fit d'ailleurs la remarque et la réplique de soeur arriva à lui sous-tirer un léger sourire. Tu sais très bien que ce n'est pas ça Nelye. Bien sûr que j'aime te porter, enfin du moins ça ne me dérange pas... mais Il se coupa, ne sachant pas trop comment continuer. Toi, à mon âge tu étais déjà sortie avec Eliott, et après t'as eu Noah, et t'as fondé une famille... et moi... rien. Il se passa une main dans les cheveux avant de soupirer, puis de continuer Je sais que c'est en partie de ma faute mais quand même... C'est à croire que je suis tellement nul et pathétique que personne ne veut de moi. Et il ne disait pas cela pour que sa sœur lui dise qu'il avait plein de qualité, il le pensait vraiment.
C'était à croire que leur famille était maudite. Comme si à chaque fois qu'ils pouvaient être heureux un nouveau coup du sort tombait sur eux. M'enfin bon, ce n'était peut-être pas le bon moment pour ruminer tout cela, alors, Thomas préféra changer totalement de sujet en lui demandant s'il ne devrait pas aller chercher son fauteuil. Après la réplique de son aînée, il se dépêcha à retourner le chercher et à le ramener près d'eux. Je sais que t'es pas lourde, mais quand même je ne me voyais pas te porter jusqu'à la maison... surtout maladroit comme je suis, on aurait fini la tronche sur le sol toi et moi... ça aurait été dommage quand même! Mouais, l'argument n'était certainement pas des plus recevable mais c'était la seule réplique qui lui était venue spontanément, alors il fallait faire avec ! Une fois réinstallé sur le sable, l'ainée posa de nouvelles questions qui firent simplement hausser les épaules au plus jeune. Non, ça va Noa est plutôt cool. Enfin, comme un chef quoi, j'ai juste peur de faire une connerie et qu'il me la ressorte à la maison... mais sinon je crois qu'il n'y a rien à signaler, à part peut-être le fait que j'ai l'impression qu'il est un peu plus sur mon dos que sur celui de quelqu'un d'autres, mais ce n'est certainement qu'une impression. Il se tut quelques secondes comme s'il réfléchissait à ce qu'il pourrait bien rajouter ! Après s'être repassé une nouvelle fois une main dans les cheveux, il glissa finalement Après tu sais, c'est disons l'apprentissage, mais je pense que je m'en sors pas trop mal... le seul truc qui casse un peu le moral c'est quand je me dis qu'il me reste environ six ans à faire... et que ça va faire long, mais le "jeu" en vaut la chandelle vu que c'est ce qui me plait ! Oui mais six ans c'était encore long, très très long même. Enfin voilà...